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Fausses notes dans l’organisation du 700e anniversaire de la mort de Dante

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La tombe de Dante à Ravenne

Le point de vue d’Ivan Simonini reflète-t-il l’opinion majoritaire des habitants de Ravenne? Difficile à dire, mais la tribune qu’il a publiée par le site Ravennanotizie.it sous le titre rageur Ravenna cancellata dal Comitato Dantesco [Ravenne effacée du Comité Dantesque] ne passe pas inaperçue. Il y dénonce pêle-mêle un «Comité écrasé sous la philologie de Dante», la présence de trois femmes seulement parmi les quinze membres et l’absence de… personnalités ravennati dans ce Comité, etc.

Son coup de gueule donne l’occasion de regarder de plus près comment se mettent en place les festivités du 700e anniversaire de la mort du grand poète, et l’organisation a été retenue.

Une loi a fixé le cadre financier de la manifestation, et le montant des subventions que versera l’État italien. C’est sans doute la première déception, puisqu’il est plus faible qu’espéré. Il est vrai que dans les trois années à venir, l’Italie va fêter l’anniversaire de trois de ces artistes les plus connus:

Face à cette conjonction, les Sénateurs italiens ont joué les rois Salomon coupant la poire des subventions en trois parts égales. La dotation globale étant de 3.450.000 euros, chaque comité s’est donc vu attribuer la somme de 1.150.000 euros. Une clé de répartition un peu étrange, sachant que le 700e anniversaire de la mort de Dante se tient un an après les 500e anniversaires du décès de Léonard de Vinci et de Raphaël. En outre, alors que la loi prévoyait une calendrier des dépenses avec une répartition régulière sur les quatre années à venir (en 2018, 150.000 euros, et en 2019, 2020, 2021 333.000 d’euros l’an), c’est une tout autre clé de répartition qui a été retenue si l’on en croit I. Simonini: l’essentiel (un million d’euros) sera dépensé en 2021, et les trois années précédentes, le Comité n’aura à sa disposition que 50.000 euros; Une misère qui suffira à peine à couvrir ses frais de fonctionnement. 

Un comité composé pour l’essentiel de philologues italiens

Le rôle du Comité, placé sous la tutelle du Ministère italien de la Culture [ministero per i Beni culturali] est donc essentiel. C’est sa composition [voir ici] que critique Ivan Simonini, non pas tant sur les personnalités qui le composent, que sur l’équilibre —où les déséquilibres— sur lequel il repose. Difficile en effet de critiquer le choix de spécialistes de l’œuvre du poète comme Enrique Malato, Giuseppe Ledda, Andrea Mazzucchi… ou encore son président Carlo Ossola, professeur au Collège de France, qui en composeront l’ossature. Eventuellement, on peut regretter avec I. Simonini que trois des plus grands commentateurs contemporains —Federico Sanguineti, Giorgio Inglese et Robert Hollander— soient absents de ce Comité, mais comme dans la composition d’une équipe de football lors d’une compétition, il est impossible de retenir tous les joueurs quelles que soient leurs qualités.

La critique du caractère « monocolore » de ce Comité est plus recevable, car comme il l’écrit «la philologie dantesque a besoin de s’ouvrir à d’autres spécialités comme l’historiographie, la psychanalyse, la médecine, la physique, l’astronomie.» 

Il est également regrettable, qu’alors que la poésie de Dante appartient désormais au patrimoine de l’humanité, le choix des membres ait été italiano-italien, avec la seule exception de René de Cecatty. Signalons au passage à Ivan Simonini, que René de Cecatty vient de publier une traduction, en vers, de la Divine Comédie, précédée d’une solide introduction. Ce n’est certes pas un étude, une analyse ou un commentaire, comme peuvent les réaliser des universitaires, mais c’est malgré tout “quelque chose de significatif” —pour un francophone en tout cas— au sujet de Dante. 

Reste le dernier volet de la polémique ouverte par Ivan Simonini, a savoir l’absence de Ravennati dans le Comité, si l’on fait exception du maire de Ravenne qui est invité permanent avec ceux de Florence et de Vérone. Une absence qui peut sembler étonnante si l’on se souvient qu’il s’agit de fêter l’anniversaire de la mort de Dante, et non sa naissance. Certains pourront trouver cette querelle ridicule et digne de Clochemerle.

Une affaire de symboles ?

La lampe à huile, pour laquelle les Florentins fournissent chaque année l’huile destinée à l’alimenter.

Peut-être, mais en Italie les symboles ont aussi leur importance. Ravenne est la ville où eut lieu le décès de Dante, et la logique voudrait qu’elle joue un rôle primordial dans l’organisation de l’anniversaire de ce décès. À cet argument on peut rétorquer que certes Dante est décédé à Ravenne, mais son héritage appartenant à l’Italie toute entière, la composition de ce Comité doit logiquement en traduire la diversité régionale. Sur ce plan celle-ci est à peu près respectée avec des Napolitains, des Romains, des Pisans, etc.

Et puis reste cette vieille histoire de la dépouille de Dante. Il faut se souvenir qu’à plusieurs reprises, Florence réclamèrent les restes du Sommo Poeta. Mais toutes les tentatives échouèrent, les moines franciscains d’abord, puis la ville de Ravenne ne voulurent jamais rien entendre, rappelant que lorsque Dante mourut, il était encore banni de sa ville de naissance. Seul geste autorisé, chaque année, pour l’anniversaire du décès, une délégation de Florence vient apporter l’huile destinée à alimenter la lampe à huile votive suspendue dans le caveau de Dante. Une tradition, mais aussi un symbole. 

Nous verrons comment évolueront ces querelles, qui pour l’instant n’ont guère rencontrées d’écho, mais l’essentiel porte sur l’événement lui-même et son organisation et là on peut être inquiet au vu de la faiblesse des moyens alloués au Comité National.

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