Didon – Dido

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Didon est la mythique fondatrice de Carthage dont elle sera la Reine. Aussi appelée Elissa (son nom phénicien était ῾Allīzāh, “la joyeuse”1, elle était la fille de Belus,2, le roi de Tyr (actuellement au Liban) et la sœur de Pygmalion. Elle épouse son oncle Sichée mais celui-ci est assassiné par Pygmalion, qui convoite ses richesses et s’empare du trône.

Didon décide alors de s’exiler et part fonder Carthage sur la côte de l’Afrique du Nord (à côté de l’actuelle Tunis), théoriquement en 853 av. J.-C. La légende veut qu’elle ait acquis un bout de territoire auprès d’un prince (ou roi) local, Iarbas (ou Hiarbas). Pour la somme payée, elle obtint une superficie égale à la « peau d’un bœuf ». Elle aurait alors découpé en très fines lanières cette peau, ce qui lui permit de délimiter un terrain beaucoup plus vaste.

Ce sont les auteurs latins —en premier Virgile— qui vont magnifier Didon et en feront un personnage mythique. Dans l’Énéide, Énée, accompagné des rescapés de la chute de Troie, aborde à Carthage. Ils sont reçus magnifiquement par Didon; Vénus charge alors son fils Cupidon»3 de «faire couler dans ses veines la folie d’amour»4.

Pour cela, Vénus imagine un stratagème: Cupidon se déguisera en Ascagne (appelé aussi Iule) le fils d’Énée pour pouvoir l’approcher. Le stratagème fonctionne et Didon, oubliant Sichée à qui elle avait pourtant juré fidélité, tombe amoureuse d’Énée. Voici comment Virgile raconte la manœuvre de Cupidon: 

il court à la reine. Elle s’attache à lui de tous ses regards, de toute son âme; parfois elle le presse contre son sein, l’infortunée Didon qui ne sait pas quel puissant dieu s’assied sur ses genoux! Mais docile à la leçon de sa mère l’Acidalienne5, il commence à effacer peu à peu l’image de Sichée et il s’applique à surprendre et à bouleverser d’un vivant amour cette âme depuis longtemps paisible, ce cœur déshabitué à aimer.6 

Leur mariage fait scandale, en particulier auprès d’Iarbas, qui avait demandé Didon en mariage. Mais les dieux veillent. Jupiter et Junon vont rappeler à Énée qu’il doit aller en Italie et envoie Mercure pour lui intimer de partir. Énée obéit et arme en secret sa flotte. Désespérée, lorsqu’elle voit s’éloigner les navires des Troyens, Didon monte sur le bûcher qu’elle a fait préparer. Lorsqu’il est allumé, elle plonge dans sa poitrine, l’épée d’Enée.7

Ovide raconte la même histoire plus sobrement: 

La fille de Sidon reçoit Énée dans son cœur et sa maison,

elle ne supportera pas la séparation avec son homme de Troie 

et dans le bûcher préparé sous prétexte de sacrifice 

se couche sur son fer; trompée, elle trompe le monde.8

Dans La Divine Comédie Dante cite à deux reprises Didon dans le Chant V. Il le fait en premier lieu aux vers 61-62, avec une allusion à sa trahison de la fidélité promise à Sichée: «L’altra è colei che s’ancise amorosa, e ruppe fede al cener di Sicheo» (“L’autre est celle qui se tua par amour, infidèle aux cendres de Sichée”). Ensuite, il la nomme lorsqu’il appelle Paolo et Francesca à «quitter la compagnie où est Didon» (“cotali uscir de la schiera ov’ è Dido” – v. 85).

Dante fait ensuite allusion à Didon au Chant VIII du Paradis, où il rappelle la scène où Cupidon déguisé en en Ascagne le fils d’Énée, se niche dans le giron de Didon pour la rendre amoureuse: «Dïone onoravano e Cupido, / quella per madre sua, questo per figlio» (“elle comme sa mère, lui comme son fils, / disant qu’il s’était assis en son giron” – v. 9). 

Enfin, au Chant IX du Paradis, le poète Folquet de Marseille, la prend en exemple pour évoquer une grande passion amoureuse: «che più non arse la figlia di Belo, / noiando e a Sicheo e a Creusa, / di me» (“car la fille de Belus ne brûla pas plus fort / en offensant Sichée et Créuse9 / que moi”, v. 97-99).